Si vous désirez que votre compagnon à 4 pattes crève sous 24h, si possible dans d'atroces souffrances, courez le faire soigner à la Clinique de la Boverie. Attention : demandez expressément le vétérinaire qui a 15 ans de pratique, ou vous risqueriez de récupérer votre animal...en bonne santé ! Pour identifier ce praticien spécialisé dans l'agonie vache, quelques indices : Si, lorsqu'il arrive à la clinique sur le seuil de laquelle vous l'attendez (car c'est un jour férié), il tire la gueule et regrette visiblement la niche qu'il a dû quitter pour assumer son tour de garde ; S'il écoute d'un quart d'oreille et avec un air goguenard votre narration au sujet des changements de comportement d'un animal que vous connaissez depuis 16 ans (plus d'appétit, apathie, amaigrissement, possible déshydratation) ; Si l'animal hurle lorsqu'il lui prend la température dans l'anus, et ne pourra ensuite plus du tout ni s'asseoir ni faire ses besoins ; Si, après avoir pratiqué une prise de sang comme un cochon, il décrète que votre animal « est en train de vous faire un hématome » ; si, quand vous objectez que c'est lui et non l'animal qui est responsable de cet hématome, il répond : « ah ben, c'est sûr que si on l'avait pas touché, il aurait rien ! » ; Si, quand vous lui posez des questions au sujet de son diagnostic (pas de déshydratation, mais gastroentérite et nausées – que vous n'avez, cependant, nullement constatées en amont), il vous avise comme si vous étiez un âne, et se met à régurgiter avec une diction de fat d'interminables salves de jargon médical, en faisant la roue derrière son bureau ; S'il se contente d'administrer un anti-vomitif et vous renvoie chez vous avec votre animal dont ni l'absence d'appétit ni l'affaiblissement ni la possible déshydratation n'ont reçu solution ; Si votre animal se porte beaucoup plus mal après être passé entre ses mains, qu'il crie, pleure comme jamais en rampant dans votre appartement, et vomit soudain malgré le traitement administré ; Si, le lendemain matin, quand vous téléphonez au vétérinaire pour lui signaler l'aggravation de la situation, tout en doutant ouvertement de la pertinence de son diagnostic, il répond avec humeur : « ah ben, c'est moi qui l'ai rendu malade, alors ! » ; Si, deux heures plus tard, à l'heure du rendez-vous fixé pour hospitaliser votre animal, il exige d'abord et avant tout que vous montriez patte blanche et fassiez allégeance à ses immaculées compétences ; S'il joue les gros bras, hausse le ton, bave et devient grossier, aboie à plusieurs reprises qu'il a « 15 ans de pratique », sans jamais se pencher sur le pauvre animal souffrant que vous avez apporté et qui gémit à fendre l'âme ; S'il finit par ouvrir la porte à toute volée et vous braille en tapant du pied de dégager car « le chef, ici, c'est moi ! » : Alors, oui, c'est lui. C'est à lui que vous devez confier le compagnon à 4 pattes auquel vous souhaitez une mort affreuse. Une visite suffira. Car l'animal était bel et bien déshydraté, il n'avait pas de gastroentérite mais une crise d'urémie. Il a été euthanasié, quelques heures plus tard, par un gentil vétérinaire compétent dont le nombre d'années de pratique importe peu. Passé un certain cap, quand on est une carne, c'est pour la vie.